Les Echos.fr : " Un achat immobilier à l’étranger ne s’improvise pas "

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INTERVIEW Louis Eudes

Les Français investissent de plus en plus dans l’immobilier résidentiel à l’étranger. Comment réussir cette opération ? Le point avec Louis Eudes (délocalia).

Les Français investissent de plus en plus dans l’immobilier résidentiel à l’étranger. Cette opération patrimoniale constitue l’occasion de s’offrir une double résidence ou au contraire de s’expatrier. A la tête de Délocalia, société spécialisée de l’immobilier résidentiel à l’étranger, Louis Eudes fait le point sur les pièges à éviter.

Comment expliquez-vous que l’immobilier international haut de gamme soit devenu une valeur " refuge " ?
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Sur le marché de l’immobilier résidentiel haut de gamme, les acquéreurs potentiels comparent les pays au regard de leur stabilité politique et de leur santé économique. Dans les pays émergents, ils peuvent être tentés de miser sur la plus-value en achetant une luxueuse villa, construite selon les normes occidentales. Si l’espace est compté comme par exemple sur une île, les potentialités de gains sont souvent plus importantes. Le récent développement immobilier à l’île Maurice, qui a autorisé les étrangers à acheter depuis 2004, l’illustre bien. Dans cette île, qui ne présente quasiment pas de décalage horaire avec l’Europe, les prix immobiliers sont libellés en devise au choix du promoteur ou du client.

L’achat au soleil avec ou sans expatriation est un phénomène croissant. Toutes les institutions en liaison avec les expatriés comme la Mission des Français de l’Etranger, la Caisse des français de l’Etranger, les caisses de retraite, et les consulats en témoignent. C’est à la fois une diversification géographique dans son allocation d’actifs immobiliers et un achat généralement à un prix moins élevé que sur la Cote d’Azur.

Justement, quelle est votre analyse des marchés immobiliers étrangers appréciés par les Français ?

Dans les destinations de proximité, figurent en bonne place la Tunisie. Ce pays s’ouvre progressivement aux acquéreurs étrangers après le Maroc qui, ayant connu une forte spéculation, a subi un retournement du marché dès la mi-2008. Pour les destinations plus lointaines, signalons les îles de l’Océan Indien et notamment l’île Maurice qui se distingue par la qualité de son offre : concept architectural et sécurité de l’investissement. Cette île multiculturelle et francophone présente la particularité d’un partenariat fort entre le gouvernement et les promoteurs pour la mise en place d’un cadre légal d’investissement immobilier sécurisant. On distingue deux types de produits immobiliers, les grands complexes (plus de dix hectares) avec services hôteliers haut de gamme appelés IRS (Integrated Resort Scheme) et les projets de moins d’un demi hectare, moins chers et le plus souvent sans services hôteliers, proposés sur le marché international sous le label RES (Real Estate Scheme). Les premiers donnent automatiquement droit à un permis de résidence.

Au niveau budget, quel montant d’investissement faut-il compter ?

Comme en France, le budget dépend de la localisation et du standing du bien immobilier. Avec moins de100.000 euros, il est possible de devenir propriétaire d’un lot sur plan dans une résidence senior au Maroc ou en Tunisie.

A l’île Maurice, les prix des villas situées dans les complexes touristiques haut de gamme (IRS) démarrent à 600.000 euros. Au delà de 500.000 USD (+/- 380.000 Euros) l’achat immobilier donne automatiquement droit au statut de résident Mauricien, un atout supplémentaire pour les candidats à l’expatriation. L’acquéreur peut cependant décider d’y établir sa résidence fiscale car son titre de résidence rendra possible des séjours de plus longue durée qu’un simple visa touristique. Il pourra alors et sous certaines conditions rigoureuses, bénéficier d’allégements d’impôts.

Quels sont les risques liés à l’achat ?

D’une manière générale, le système français protège l’acheteur. A l’étranger, ce n’est pas toujours le cas. En premier lieu, il faut parler du risque lié au titre de propriété. La plupart des pays émergents perfectionnent leurs systèmes de cadastre (Ile Maurice, Sénégal, Cambodge) mais des portions entières de territoire peuvent non seulement rester vierge de tout relevé topographique mais aussi présenter des lacunes importantes et dommageables pour la sécurité des transactions immobilières ou foncières.

En second lieu, évoquons les risques financiers liés à la devise de la transaction. Un particulier achète un bien immobilier en payant le prix soit comptant (cas de l’ancien) soit à terme (cas de la vente sur plan). Dans ce dernier cas, il s’engage à effectuer des versements échelonnés sur plusieurs mois voire plusieurs années. Le prix étant toujours libellé en devise, par exemple en dirham ou en dollars, l’acquéreur européen prend un risque de change, qui peut soit l’avantager, soit le pénaliser. Des solutions existent pour encadrer ce risque. Par ailleurs, les taux de change pratiqués par les banques sur les devises dites " rares " peuvent se révéler prohibitifs. Là encore des solutions existent.

Enfin, comme toute opération patrimoniale, l’achat d’un bien à l’étranger donne lieu un jour, à une revente. Il faut alors bien s’assurer de la possibilité de rapatrier les fonds quand un contrôle des changes existe. Autant de points à étudier avant de s’engager, en prenant soin de se renseigner à la fois en France et dans le pays où l’on souhaite acheter

Propos recueillis par MARTINE DENOUNE,
Les Echos.fr , le 31 mars 2010