Villas de rêve ?

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Opinion par Pierrick Pédel - Responsable économique du groupe La Sentinelle.
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Villas de rêve ?

Au départ l’idée était simple. En 2002, le gouvernement lanœ le mécanisme de l’ "Integrated Resorts Scheme". Cet IRS permet l’acquisition de biens immobiliers de luxe par des ressortissants étrangers en leur donnant l’opportunité d’obtenir le statut de résident permanent. Moyennant un investissement minimal d’un demi-million de dollars, ce statut s’accompagne d’un régime fiscal avantageux si le pays d’origine de l’acheteur est signataire d’un traité de non double imposition avec Maurice.

L’objectif est clair : il s’agit aIors d’attirer des personnes disposant d’un important pouvoi d’achat et d’un réseau à fort potentiel. Aujourd’hui, le bilan est plus que mitigé. C’est que la crise est pas¬sée par là et les villas à un million d’euros pièce ne partent pas vraiment comme des petits pains. De la vingtaine de projets de villas IRS lancés, seuls cinq ont véritablement abouti : Anahita (CIEL), Tamarina (Médine), Villas valriche (Espral), Belle-Rivière et Club Med à Albion. Deux autres projets sont en cours de démarrage dont celui de La Balise Marina (Espral). Et trois projets devraient connaître un début de concrétisation l’année prochaine.

On est donc loin des 6 000 à 7 000 villas annoncées en 2002 et des milliards de dollars de chiffre d’affaires qu’elles auraient dû générer. D’autant qu’entre-temps, le gouvernement a lancé le "Real Estate Scheme"(RES) qui propose des logements haut de gamme pour une moyenne de prix de 500 000 dollars. Aujourd’hui, quelque 23 projets RES ont été adoptés par le "Board of Investment"(BOl) ce qui représente 1 000 logements haut de garrre et un chiffre d’affaires potentiel de l’ordre de 500 millions de dollars. Une sérieuse concurrence pour les IRS.
Chez les promoteurs, le rêve n’est donc pas devenu réalité.

Les investissements (terrassement, aménagement de la voirie et des réseaux) sont colossaux. Les frais initiaux (conversion des terres agricoles, TVA et réserves pour la contribution sociale) se révèlent exorbitants. Pour chaque villa, le promoteur doit, par exemple, payer 200 000 roupies de contribution sociale. Chez Espral (groupe ENL), on a déjà payé 15 millions de roupies depuis le début de l’année pour les villas valriche de Bel-ombre et l’en¬semble du projet représente 60 millions.
Le niveau d’investissement est tel qu’une fois engagé, le pro¬jet devient en pratique plus coûteux à arrêter qu’à poursuivre. D’où la volonté des acteurs de rechercher une optimisation de leur dépenses. Les récentes restructurations des groupes sucriers (fusion Mon Désert A1ma-Savannah et Harel Frères-The Mount, réorganisation chez Médine) ont d’ailleurs eu pour objet une meilleure gestion du foncier dans le cadre des projets IRS.

L’Etat est venu donner un coup de main aux promoteurs en donnant notamment la possibilité aux étrangers de contracter des emprunts bancaires pour financer l’achat de biens fonciers en IRS. Mais la demande tarde toujours à se manifester comme le montrent ces villas restées au stade de dalles de béton ou ce panneau publicitaire sur la route de Grand-Baie barré d’un ban¬deau "80% sold" qui a été rapidement retiré. Ce qui n’empêche pas de nouveaux acteurs de s’intéresser au secteur des villas de rêve. Le "Sugar Investment Trust" et le groupe Sud.africain ."Jawitz Properties" se sont déjà manifesté. Mais attention le réveil pour¬rait se révéler douloureux. .