Les inondations du 30 mars 2013 : une leçon à tirer

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Le samedi 30 mars 2013 demeure une journée noire pour la population mauricienne. La tragédie survenue suite aux pluies diluviennes suivies du phénomène de flash flood (crues rapides) ont coûté la vie à 11 personnes dans la région de Port-Louis et de ses alentours.

Une tragédie sans précédent

Il faut remonter à 1960 lors du passage du cyclone Carol pour recenser un aussi lourd bilan en vies humaines : 39 victimes. En 1962, Maurice paya un lourd tribut en vie humaine, soit 14 morts suite au passage du cyclone Jenny et plus de 50 ans plus tard, sans crier gare et sans alerte météorologique, 11 personnes ont trouvé la mort lorsque plus de 150 millimètres de pluies se sont abattues sur la capitale en moins de 2 heures. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Les corps de six victimes ont été découverts dans la capitale et ses environs soit 6 dans le tunnel piétonnier du Caudan devant le Harbour Front auxquels sont venus s’ajouter au fil de la journée trois nouvelles victimes. Deux d’entre elles étaient portées disparues et ont été retrouvées dans le parking souterrain du bâtiment abritant Mc Donald’s. Le troisième fut retrouvé à l’arrière du fast food Kentucky Fried Chicken de la Chaussée.

La polémique enfle
On aura beau chercher le véritable coupable de cette catastrophe liée selon le Premier Ministre, Navin Ramgoolam, « aux changements climatiques. » Des voix se sont élevées pour condamner les services météorologiques de Vacoas, on a tenté de trouver des bouc-émissaires, des plateformes citoyennes ont été créés sur les réseaux sociaux (la création des groupes Facebook comme Black Saturday et Resign Now, une chasse aux sorcières a été instiguée pour essayer de faire porter la responsabilité à l’Honorable Anil Bachoo, Ministre des Infrastructures Publiques pour son rôle dans la gestion des drains et évacuations d’eau, le Ring Road, l’asphaltage et le bétonnage à l’entrée de Port-Louis et l’obstruction du Ruisseau du Pouce a été mis en cause, l’équipement rudimentaire dont dispose notre station météorologique, la lenteur des services de police a été pointé du doigt, mais loin de toute cette agitation, le point crucial qui mérite vraiment d’être approfondi demeure, l’après-inondations.

Comment faire face dans le futur à une situation semblable et quelles sont les mesures concrètes qui doivent être prises pour parer à cette éventualité qui rejoint le point avancé que notre Premier Ministre : le changement climatique. Si la station météorologique de Vacoas a été incapable d’informer la population sur les averses torrentielles qui allaient toucher l’île et dans quelles régions, comment se prémunir ? Le bulletin émis par la station de Vacoas, le jour du drame, ne laissait en rien supposer que les pluies qui allaient s’abattre sur l’île allaient être d’une telle intensité.

Au lieu de querelles intestines qui anime la vie politique mauricienne à essayer de trouver le coupable idéal entre le camp de l’Opposition et celui du gouvernement, ne serait-il pas plus sage de mettre de côté les différends, aspirations personnelles, claniques et obsession premier-ministérielle pour essayer de mettre en place un plan pour prévenir ses risques de catastrophes naturelles en unissant leurs forces. Il ne faut pas perdre de vue que Maurice a été victime de pluies sans précédents en terme d’intensité et que l’île n’est pas à l’abri d’un éventuel séisme ou tsunami. Est-ce que nous, Mauriciens, sommes préparés à ces éventualités ? Existe-t-il des plans d’évacuation prévus à cet effet ? L’avenir reste incertain mais il n’est jamais trop tard pour bien faire et comme on dit, l’union fait la force. Il nous suffit juste d’unir nos efforts, nous citoyens et décideurs politiques pour mettre en place une stratégie qui nous permettra certainement d’affronter l’avenir avec plus de sérénité.

La prévention
Face aux changements climatiques qui guette la planète, tout un chacun se doit de considérer ses conséquences sur l’avenir de notre planète ; il y a va de notre survie. Le réchauffement de la terre provoquera selon les scientifiques la fonte des glaces aux pôles et réactions en chaîne, le niveau de la mer montera. Le GIEC (Groupe Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat), dans son bilan de 2001 indiquait que "selon les modèles, un réchauffement annuel moyen local de plus de 3 °C se prolongeant pendant des millénaires entraînerait la fonte quasi totale de la nappe glaciaire du Groenland, ce qui ferait monter le niveau de la mer d’environ 7 mètres." Dans cette sombre éventualité, beaucoup de pays se verront en danger de quasiment disparaitre sous les eaux : Bangladesh, Pays Bas, les Maldives, la Polynésie-Française entre autres. Le monde se grouillerait de réfugiés climatiques.

De ce fait, beaucoup de pays ont entrepris des mesures pour prévenir ce genre de risques liés aux montées des eaux et parmi, le Pays Bas. Comme son nom l’indique, l’altitude est proche ou inférieure à zéro, 60 % des terres se trouvent sous le niveau de la mer. Habitués à se battre contre l’eau depuis plus de 300 ans, les Néerlandais doivent désormais faire face aux conséquences du réchauffement climatique sur deux fronts. A l’ouest du pays, le niveau de la mer s’élève. Il faut renforcer les dunes pour éviter les risques d’inondations. A l’est, le débit des grands fleuves européens, tels que la Meuse et le Rhin, augmente chaque printemps et menace de détruire les digues.

Pour protéger les villes à l’intérieur du pays, il faut aussi réaménager le territoire : selon le gouvernement néerlandais, les Pays Bas vont dépenser près de 2 milliards d’euros par dans les prochaines décennies pour protéger ces zones. Les Néerlandais ont mis au point un programme de contrôle des inondations de 3 milliards de dollars appelé Room for the River, où plutôt que de rehausser sans cesse son vaste système de digues le long des rivières pour se prémunir contre plus les montées des eaux provoquées par les changements climatiques, 39 spots ont été désignés pour permettre aux cours d’eau pour développer naturellement.
La question est cruciale aussi aux Etat-unis dans la ville de Miami où la prévention a déjà débuté. Grâce à une subvention de 50 millions de dollars de Federal Emergency Management Agency (FEMA), la ville commence à se prémunir des risques d’inondations en installant des pompes massives avec une capacité de pompage de 4500 gallons par seconde pour l’évacuation d’eau.

Concernant l’Ile Maurice, suite aux inondations, le Premier Ministre a annoncé que des experts singapouriens seront au pays dès ce samedi pour déterminer les causes des inondations et leur cahier des charges a été finalisé. Il a aussi annoncé une enquête judiciaire sur les inondations. Il a notamment remis des bons d’achats à 88 sinistrés de Canal Dayot, Sable Noir, Cité-Vallijee et Pailles. Chaque famille a reçu un ‘voucher’ de Rs 100 000 pour acheter des produits d’ameublement et électroménagers dans certains magasins.

Solidarité des Mauriciens et hommage aux victimes
La solidarité des Mauriciens a été exemplaire et mérite d’être soulignée. Le lendemain de cette inondation, le public et les représentants de plusieurs entreprises se sont convergés vers Canal Dayot pour faire le nettoyage et offrir aux familles affectés des vivres, vêtements, matelas et produits de première nécessité. Un télédon organisé par le Ministère de l’Intégration sociale et la radiotélévision nationale pour venir en aide aux sinistrés des inondations a permis d’obtenir Rs 3,698350 en cash, par chèque et par SMS.

Un jour de deuil national a été décrété le 1er avril en signe de solidarité à ceux affectés par les intempéries et quelques jours après le drame, certains avaient tenu à être présents à des cérémonies en mémoire des disparus. Beaucoup de Mauriciens ont participé à un candlelight à la Mairie de Port-Louis alors que les proches des disparus s’étaient réunis en la Cathédrale St James pour une messe.

Une pensée spéciale aux disparus des inondations, à leurs proches et à tous les victimes touchées par ce drame, une façon de dire qu’on ne les oublie pas.

Written By
Dany Gowsee